Yves Saint Laurent : La révolution du genre
Rencontre avec Christine Bard
Pour moi, rien n’est plus beau qu’une femme dans un vêtement d’homme ! Parce que toute sa féminité entre en jeu : une femme ne rentre pas dans un vêtement d’homme, elle doit lutter contre, et sa féminité s’exprime davantage. » Yves Saint Laurent
Dès sa toute première collection, présentée en 1962, Yves Saint Laurent puise dans le vestiaire masculin. Le modèle qui ouvre le défilé est un caban, manteau de marin, porté sur un pantalon de shantung blanc. Ce geste, véritable manifeste, est révolutionnaire pour une époque où le pantalon reste principalement l’apanage des hommes, et dont l’usage reste minoritaire parmi les femmes. Les créations qui vont suivre, le smoking en 1966, le tailleur-pantalon et la saharienne en 1967, le jumpsuit en 1968, participent à cette démarche qui permet aux femmes de revêtir les codes du pouvoir.
Depuis l’ordonnance de 1800 interdisant aux femmes de s'habiller en hommes, le vêtement féminin a connu de fascinantes transformations. Le travail d’Yves Saint Laurent participe à cette révolution qui s'accélère dans les années 1960.
Le couturier répond en effet aux attentes de son époque : « Ce que je […] propose ce n’est pas une nouvelle ligne […] mais la liberté. La virilité n’est pas plus liée à la flanelle grise et à l’épaule débordante que la femme ne l’est à la mousseline ou à la gorge pigeonnante. Je pense que le temps des femmes poupées et des hommes dominateurs est révolu ».
L'historienne Christine Bard reviendra sur les dynamiques de transformation vestimentaire au prisme du genre, dans la France des XIXe et XXe siècles, ainsi que sur les controverses qu’elles provoquent.
Christine Bard
Christine Bard est professeure des universités en histoire contemporaine à l'Université d’Angers et membre honoraire de l’Institut universitaire de France. Spécialiste de l’histoire des femmes, du genre et du féminisme en France, elle a publié, depuis sa thèse, Les Filles de Marianne (1995), de nombreux livres et dirigé, avec Sylvie Chaperon, le Dictionnaire des féministes (2017). Elle préside l’association Archives du féminisme et anime le musée virtuel MUSEA. Elle vient de codiriger deux ouvrages, l’un, avec Mélissa Blais et Francis Dupuis-Déri, sur les antiféminismes (Puf), l’autre, avec Frédérique Le Nan, sur Dire le genre. Avec les mots, avec le corps. Elle est aussi connue pour ses recherches sur la dimension symbolique du vêtement : en 2010, elle a publié Une histoire politique du pantalon (Le Seuil) et Ce que soulève la jupe (Autrement).
Revivre la conférence
Pour découvrir ou réécouter la conférence de Christine Bard consacrée aux féminismes à travers l'histoire du vêtement, abonnez-vous au podcast du Musée Yves Saint Laurent Paris.